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  • L’attentat contre Charlie Hebdo : l'occultation

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    Saïd Bouamama est sociologue et militant associatif et politique. Il s'intéresse particulièrement à l'immigration, aux discriminations et au racisme. Il compte  parmi les fondateurs du mouvement des Indigènes de la République, il est également affilié à la CGT et membre de la Coordination communiste.

    A lire, sur son blog, une réflexion sur "L’attentat contre Charlie Hebdo : l'occultation politique et médiatique des causes, des conséquences et des enjeux"

    3992716853.pngL’attentat contre l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo marquera notre histoire contemporaine. Il reste à savoir dans quel sens et avec quelles conséquences. Dans le contexte actuel de « guerre contre le terrorisme » (guerre extérieure) et de racisme et d’islamophobie d’État, les artisans de cet acte ont, consciemment ou non,  accéléré un processus de stigmatisation et d’isolement de la composante musulmane, réelle ou supposée, des classes populaires.
    Les conséquences politiques de l’attentat sont déjà désastreuses pour les classes populaires et cela va se renforcer si aucune alternative politique à la fameuse « Union Nationale » n’est proposée.
    En effet, la manière dont les médias français et une écrasante majorité de la classe politique réagissent est criminelle. Ce sont ces réactions qui sont dangereuses pour l’avenir et qui portent en elles de nombreux « dégâts collatéraux » et de futurs 7 et 9 janviers toujours plus meurtriers. Comprendre et analyser pour agir est la seule posture qui peut permettre aujourd’hui d’éviter les instrumentalisations et dévoiements d’une émotion, d’une colère et d’une révolte légitime.(...)

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  • Valls : horizon 2017

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    manuel-valls-ce-n-est-pas-seulement-la-communaute-juive_927851_460x306.jpgDu temps où il vibrionnait en tant que ministre de l'Intérieur,   Walls était comme la mouche du coche et s'agrippait au moindre sujet médiatique.

    Il obéissait alors à une com' bien rodée se déroulant en trois temps et centrée sur les thèmes de l'immigration, de la sécurité et de la laïcité.

    Son ministère s'était spécialisé dans les catastrophes naturelles (crues, déraillements, avalanches...), les problèmes de cultes (et particulièrement ce qui concerne les musulmans), les faits divers ( braquage, meurtres et drogue) et les libertés publiques.

    Depuis il est devenu Premier ministre, et il est sur toute les grandes chaînes d'info :

    « Ainsi certaines gens, faisant les empressés,
    S'introduisent dans les affaires :
    Ils font partout les nécessaires,
    Et, partout importuns, devraient être chassés. »

    Les trois temps du political wannabe

    "Manuel Valls est par atavisme un political wannabe ; celui qui se place dans la roue des puissants du moment et qui ne la lâche plus : hier Rocard, puis Jospin, ensuite Royal, brièvement Strauss-Kahn, et, tardivement, Hollande. Deuxième et Première gauche, gauche caviar, gauche New Age et gauche démocrate. Valls s’est mis au service de tout le monde, sans aucun état d’âme. Si Manuel Valls accentue toujours plus sa rhétorique droitière, c’est qu’il est persuadé qu’il s’agit d’une stratégie payante. C’est le discours que ses conseillers à Euro RSCG (l’officine des socialistes losers de la présidentielle) et les sondeurs susurrent quotidiennement à son oreille. Un nombre croissant de ses collègues au gouvernement l’a compris : Valls évolue dans le champ politique au gré de ses intérêts personnels. La balise est déjà à l’horizon : Élysée 2017. ( Article de Philippe Marlière " Manuel Valls, le conformiste ou comment les grands médias français fabriquent un Solférinien présentable pour la prochaine présidentielle.

    Com' toujours

    Sondages en amont :

    1. ne pas prendre de risque : par exemple les sondages montrent un rejet de Dieudonné et de ses positions pour les 2/3 des Français; ceux concernant les propos du ministre  sur l'intégration des Roms étant approuvés par presque huit Français sur dix,.
    2. Utiliser l'opinion publique comme un bouclier contre les opposants de son propre camp.

    Le coup médiatique,  avec l'histérisation de certains médias :

    1. Être ici là et ailleurs et faire parler de soi : lors de la catastrophe ferroviaire de Brétigny, Valls était dans le Gard, il revenu de toute urgence à Brétigny, en falcone payé par les deniers publics, pour une déclaration de deux minutes avant de repartir dans le Gard.
    2. occuper le terrain: comme choisir une date d'intervention en période creuse, entre les deux réveillons;
    3. redorer son blason et se faire accepter par son camp. L'affaire Dieudonné intervient après l'épisode désastreux des Roms.
    4. Engager des combats peu risqués : l'antisémitisme aujourd'hui n'est pas un problème en France et n'est tenu et défendu que par une poignée d’extrémistes;
    5. Intervenir sans aucun risque médiatique, de manière brève au rythme de l'info en continu : le Monde lui a proposé un long interview depuis 2012 qu'il n'a jamais accepté.

    Sondage pour vérifier que le coup médiatique a réussi : séduire à droite et être le politique préféré des Français. 

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  • 3 bourreaux et 1 Charlie

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    4860007-7252596.jpgChantera-t-il la Marseillaise ce chef d’un gouvernement qui mène une politique raciste envers les palestiniens et une partie de sa population ? Ce responsable de crimes de guerre à Gaza et de la poursuite de la colonisation en Cisjordanie et à Jérusalem Est, entonnera-t-il le Chant des partisans ? Cet architecte du blocus de la bande de Gaza, déposera-t-il une couronne à la Bastille ou à République. Ou ce haut responsable de la politique belliciste et expansionniste israélienne n'est-il en France que pour provocation ?

    Benjamin Netanyahu sera accompagné par Avigdor Lieberman et Naftali Bennett pour représenter l’État d’Israël à la manifestation européenne. Paris accueillera ainsi trois individus qui relèvent de la Cour Pénale Internationale pour les meurtres de masse commis à Gaza et ailleurs.

    Ces trois-là  ne représentent que eux-mêmes et n’ont aucune légitimité à venir honorer la mémoire de qui que ce soit et certainement pas des Juifs tués dans le magasin casher à Paris.

    " La manifestation devait être soi-disant « d’unité nationale » contre le terrorisme et pour la liberté d’expression. Elle sera en réalité une représentation des « valeurs du monde civilisé occidental » contre les « menaces terroristes du monde arabo-musulman », une manifestation bien dans la tonalité du « choc des civilisations » qui d’après nos gouvernants, même quand ils se défendent de diffuser ce point de vue, régit le monde actuel. " UJFP

    Le M'PEP, Mouvement d’émancipation populaire, dresse un rapide portraits des trois représentants d'Israël.

    3992716853.pngBenjamin Netanyahu, Premier ministre israélien, s’est toujours opposé aux Accords d’Oslo. Ces derniers résultent de discussions entre des négociateurs israéliens et palestiniens tenues à Oslo en Norvège, pour poser les premiers jalons d'une résolution du conflit israélo-palestinien. Une Déclaration de principes a été signée à Washington le 13 septembre 1993 en présence de Yitzhak Rabin, Premier ministre israélien, de Yasser Arafat, Président du comité exécutif de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) et de Bill Clinton, Président des Etats-Unis, pour régler le problème et poser les bases d’une autonomie palestinienne temporaire de 5 ans. Benjamin Netanyahu a favorisé la construction de nouvelles implantations israéliennes en Cisjordanie, en expulsant les Palestiniens. Il s’est toujours opposé à la création d’un État palestinien. Avant de prendre l'avion pour Paris il a lancé un appel : "A tous les juifs de France, tous les juifs d'Europe, je vous dis : Israël n'est pas seulement le lieu vers lequel vous vous tournez pour prier, l'Etat d'Israêl est votre foyer".

    Avigdor Lieberman, ministre des Affaires étrangères, a fondé le parti d'extrême droite Israel Beytenou. Lors de la seconde intifada, en 2002, il demande le bombardement des stations d'essence, banques et centres commerciaux palestiniens. Il s'oppose au plan de désengagement des territoires occupés et propose en mai 2004 un plan alternatif dans lequel il prévoit une séparation entre Juifs et Arabes « pour créer deux États ethniquement homogènes ». En janvier 2008, Avigdor Liberman a quitté le gouvernement afin de s'opposer aux négociations de paix avec les Palestiniens. Il a été inculpé de « blanchiment d’argent », « fraude », « subornation de témoins », « entrave à la justice »…

    Naftali Bennett est un homme d’affaire et politicien qui dirige le parti politique sioniste religieux d’extrême-droite Le Foyer juif, ainsi que le mouvement pro-colonies My Israel. En juillet 2013 il déclare : « J'ai tué beaucoup d'Arabes dans ma vie. Et il n'y a aucun problème avec ça », lors d'une réunion retranscrite par le quotidien Yedioth Ahronoth.

    *

     

    activestills_1.jpgUne pensée pour la liberté d'expression, pour Abdallah Abu Rahma, militant palestinien, qui risque des années de prison pour simple délit d’opinion.

    Il a été déclaré coupable le 21 octobre pour des charges liées à une manifestation organisée en 2012. Pour son avocate, Gaby Lasky, " il semble que la per­sé­cution d’un Pales­tinien pour un acte sym­bo­lique non-​​violent contre l’occupation a davantage de signi­fi­cation poli­tique que criminelle ". 

    En 2010, il avait déjà été condamné à 12 mois de prison "pour col­lectage de douilles de gre­nades lacry­mo­gènes et de balles tirées sur les mani­fes­tants par l’armée israé­lienne et qu’il uti­lisait pour montrer les vio­lences per­pé­trées contre les mili­tants palestiniens."

    Abdallah Abu Rahma, défenseur des droits de l'homme, ne pourra donc pas venir à Paris.

    Pétition de soutien est en ligne

    3caafc3ba45685411c551b36a80ca148.jpg

  • Quelle union nationale ?

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    Dessin et commentaire

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    Dessin donné par Charb à la Pla­te­forme des ONG pour la Palestine en 2002 pour la Cam­pagne « Occu­pation : pas d’Accords ! ».

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    Dix ans plus tard, et concernant toujours le boycott et les boycotteurs des produits israëliens, Michèle Alliot-Marie, alors ministre d’Etat sarkozyste de la justice et garde des sceaux, mettait les points sur les "i" dans son discours au dîner de l’antenne bordelaise du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) du 18 février 2010.

    "Je n’accepte pas que des personnes, responsables associatifs, politiques ou simples citoyens, appellent au boycott de produits au motif qu’ils sont kasher ou qu’ils proviennent d’Israël. Je souhaite que le parquet fasse preuve de davantage de sévérité à ce sujet. J’ai donc adressé une circulaire aux parquets généraux, leur demandant d’identifier et de signaler tous les actes de provocation à la discrimination. J’entends que tous les auteurs d’actes soient poursuivis dès qu’ils auront été identifiés et notamment quand les appels auront été faits sur Internet. A cet égard, je salue la détermination du parquet dans l’affaire de l’individu qui avait appelé au boycott de produits israéliens par voie d’affichettes dans un centre commercial de Mérignac. »

    Le 17 décembre 2010, Mohamed Bouazizi s'immolait par le feu, puis des dizaines de Tunisiens révoltés contre la dictature de ben Ali tombaient sous les balles. Profitant des fêtes, Michèle Alliot-Marie s'en allait réveillonner en Tunisie. A son  retour dans la patrie des droits de l'Homme, notre inoxydable  proposait à l'Assemblée nationale que la France de droite aide le Ben Ali à sécuriser sa Tunisie agitée par une méchante insurrection.

    " Nous proposons que le savoir-faire qui est reconnu dans le monde entier de nos forces de sécurité permette de régler des situations sécuritaires de ce type. C'est la raison pour laquelle nous proposons aux deux pays, dans le cadre de nos coopérations, d'agir en ce sens pour que le droit de manifester puisse se faire en même temps que l'assurance de la sécurité."


    ALLIOT-MARIE propose d'aider la Tunisie dans la... par SuperBeurkMan

  • Réinvestir le crime : le magasin aux accessoires légaux

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    " ll s'agit de savoir à cette heure si la République Française en est là. Je m'empresse de dire bien haut que, s'il ne s'agissait que de la République telle que l'ont faite vingt-cinq ans d'opportunisme, telle que nous la connaissons sous les espèces d'un Président-parvenu qui joue au souverain, d'un premier ministre sournoisement brutal qui essaye d'adapter à sa lourde main la poignée du glaive de la raison d'État, d'un Parlement où tout est représenté, sauf la conscience et l'âme de la France, il ne vaudrait sans doute pas beaucoup la peine de se préoccuper bien vivement du sort de cet édifice branlant. (Francis de Pressensé -1899)

    Les liens de cet article s'ouvrent dans la même fenêtre

    Troisième république : 1893-1894

    arton1748-a6890.jpg" Un léger frisson troubla la quiétude des majorités, d'ordinaire si sereine d'inconscience, le jour où les "lois scélérates furent inscrites dans le Code.

    Mais bientôt chacun, dans son for intérieur, se morigéna et, afin de n'avoir pas à s'indigner de tout l'arbitraire que ces lois nouvelles faisaient prévoir, se fit une raison : 

    " A quoi bon s'effrayer ? Les lois scélérates étaient un tonnerre de parade. On allait reléguer ça dans le magasin aux accessoires légaux et elles ne seraient guère qu'un croquemitaine pour grands enfants... croquemitaine d'apparence rébarbative, mais en réalité bénin, — bonne pâte, carton-pâte."

     Emile Pouget

     Réinvestir le crime.

    La IIIème république, issue du Second empire et de la répression de la Commune de Paris, établit  le monopole politique d'une " bourgeoisie aussi égoïste et moins décorative que l'ancienne noblesse et de la corruption croissante d'une société asservie au capitalisme." ( Frédéric  de Pressensé)

    En quelques années, les anciens carbonari qui ont lutté contre le régime de la Restauration se sont métamorphosés en gardiens d'un régime à qui ils doivent leur carrière, leur fortune et la réalisation future de leurs sordides ambitions. 

    Les revendications sociales les plus élémentaires sont de longue date assimilées à une insurrection contre l'ordre établi — et L'Etat de droit n'a de cesse d'affirmer sa capacité de répression comme en témoigne le massacre de Fourmies du 1er mai 1891. 

    Sadi-Carnot, intronisé par ses pairs président de la république pour un mandat de 7 ans (3 décembre 1887),se présente comme le sauveur d'un régime malmené par l'épisode antiparlementariste du général Boulanger et le scandale politico-financier de Panama (1882) — scandale vite escamoté mais qui continue de jeter le discrédit sur des élites politiques et des parlementaires bienveillants  envers  des  milieux  d'affaires  véreux.  

    Pour  redorer le blason d'une  jeune république de 23 ans — déjà corrompue — et se rapprocher du peuple, Sadi Carnot met en scène son pouvoir : il diffuse ses portraits aux quatre coins du pays, il participe aux nécessaires œuvres de charité et multiplie ses déplacements dans les provinces  à la manière de Napoléon III — inspiré de l' Ancien régime.

    C'est  lors d'un de ces "voyages de souveraineté" à Lyon qu'il est assassiné le 24 juin 1894 par Santo Caserio, un anarchiste italien.

    Ce présicide,  est  utilisé à des fins de sanctification laïque du régime. 

    En 1893 et 1894, le gouvernement exploite la panique provoquée par quelques attentats d'anarchistes « individualistes » qui mettent en pratique la « propagande par le fait ». Ces actes, admis par une partie des militants anarchistes ne viset pas les personnes – du moins jusqu'à l'attentat d'Emile Henry, du 12 février 1894, et ses victimes anonymes.

    Sous le prétexte de défendre l'ordre social et la sécurité publique, le pouvoir puise alors dans le " magasin aux accessoires légaux " et initie des lois d'exception accompagnées de peines plus que draconiennes.

    Dans l'incapacité d'apporter une réponse à la question sociale, il va «réinvestir le crime de telle sorte qu'il puisse unir la population autour du régime.» ( Karelle Vincent )  

    *

    1893-1894 :  l'arbitraire et l'injustice.

    Les trois lois connues sous le terme générique de « lois scélérates », élaborées dans la précipitation, furent votées en sept mois. Fondées sur l'arbitraire et l'injustice elles se complétaient et violaient tous les principes du droit.

     « Elles abrogent les garanties conférées à la presse en ce qu'elles permettent la saisie et l'arrestation préventive ; elles violent une des règles de notre droit public en ce qu'elles défèrent des délits d'opinion à la justice correctionnelle ; elles violent les principes du droit pénal en ce qu'elles permettent de déclarer complices et associés d'un crime des individus qui n'y ont pas directement et matériellement participé ; elles blessent l'humanité en ce qu'elles peuvent punir des travaux forcés une amitié ou une confidence, et de la relégation un article de journal. » ( Léon Blum)

    Dans la pratique elles s'appuyèrent sur des magistrats zélés qui renchérissaient sur les textes légaux, ajoutaient la relégation au châtiment principal et faisaient peu de cas d'un point de droit absolu qui est que les lois n'ont pas d'effet rétroactif.

    Dans certains cas, la disproportion de la peine était telle qu'elle incitait le procureur ou le jury à intercéder pour une grâce ou une révision.  Par la loi du 28 juillet 1894,  tout condamné à plus d'un an de prison pour des délits « anarchistes » était  reléguable à une deuxième condamnation.  

    *

    Loi du 12 décembre 1893 :  saisie et arrestation préventive. 

    La loi du 12 décembre 1893 avait pour objet de modifier celle du 29 juillet 1881 sur la presse. Le prétexte en fut l'attentat de l'anarchiste Vaillant qui, le 9 décembre 1893, lança une bombe dans l'hémicycle de la Chambre des députés — cet acte qui ne fit aucune victime et n'interrompit même pas la séance du jour lui vaudra pourtant d'être guillotiné, Sadi Carnot lui refusant  la grâce présidentielle.

    Casimir-Perier se saisit de l'occasion pour soumettre au vote un ensemble de mesures répressives dont voici l'esprit : 

    « Alors que la loi sur la presse ne punit que la provocation directe aux faits qualifiés crimes, le nouveau texte frappait la provocation indirecte, c'est-à-dire l'apologie. Les pénalités étaient élevées. Dans tous les cas — exception faite pour les délits contre la sûreté intérieure de l'Etat  le juge pouvait, contrairement au principe posé par l'article 49 de la loi du 29 juillet 1881, ordonner la saisie et l'arrestation préventive. » (Léon Blum)

     *

    Loi du 18 décembre 1893 : l'intention et l'entente.

    Cette loi portait sur les associations de malfaiteurs. 

    Elle « lésait un des principes généraux de notre législation. La loi française pose en principe que le fait coupable ne peut être puni que quand il s'est manifesté par un acte précis d'exécution. Aux termes de ce nouveau texte, la simple résolution, l'entente même prenait un caractère de criminalité. » (Léon Blum)

    Le mot d'entente avait été choisi à dessein parce qu'il permettait de frapper aussi bien le présumé coupable que son entourage : famille, amis ou simples connaissances.

    « C'est sur ce mot d'entente que la discussion porta. Elle fut brève. M. Charpentier vint protester contre la précipitation avec laquelle le gouvernement demandait à la Chambre de créer ainsi à la fois un nouveau mot et un nouveau crime. MM. Jourde, de Ramel, Goblet montrèrent. que tout peut être considéré comme une entente, une lettre, une conversation, le hasard d'une rencontre, La Chambre ne les écouta pas. M. Flandin répondit qu'on voulait précisément atteindre des groupes non organisés, des concerts fortuits, des associations provisoires, et qu'à dessein l'on avait choisi le mot le plus vague qu'offrit la langue. Un amendement de M. Jourde tendant a  remplacer le mot entente par les mots «résolution d'agir concertée et arrêtée», fut repoussée par 406 voix contre 106.  406 voix contre 39 votèrent aussitôt après l'ensemble du projet de loi.  » ( Léon Blum)

    *

    Loi du 28 juillet 1894 : délits de plume et de parole.  

    La « loi tendant à réprimer les menées anarchistes » se présentait comme une réponse à l'assassinat de Sadi Carnot du 24 juin 1894. Elle muselait la presse  et l'opinion en réprimant toute forme de propagande — anarchiste ou pas —,  en créant l'équivalent d'une  double  peine  ainsi que d' une peine plancher et en envisageant d'interdire la reproduction des débats.  Le ministère la loi de 1894,  sera aussi le ministère de l’affaire Dreyfus.

    « Le lundi 9 juillet, le garde des sceaux, un sénateur du Vaucluse nommé Guérin, montait à la tribune, et donnait lecture d'un nouveau projet de loi destiné à atteindre ceux qui, « en dehors de tout concert et de toute entente préalable, font par Un moyen quelconque, acte de propagande anarchique » M. Guérin résumait en quelques mots la loi nouvelle. Il s'agissait non seulement des délits prévus par la loi du 12 décembre 1893 (délits de presse, délits publics), — mais de tous les actes de propagande, quels qu'ils fussent, des actes de propagande secrète, intime, confidentielle, résultant d'une conversation entre amis ou d'une lettre privée. Ces délits étaient désormais déférés non plus au jury, mais à la juridiction correctionnelle, « une répression rapide étant seule efficace ». L'emprisonnement devait être individuel sans qu'aucune diminution de peine ne pût s'ensuivre. Les tribunaux pouvaient décider que les condamnés seraient relégués à l'expiration de la peine. Les tribunaux pouvaient interdire la reproduction des débats. » (Léon Blum)

     

     *

    Le principe des lois d'exception  

    En quelques mois  le pouvoir mettait en place un dispositif législatif violant tous les principes du droit afin de museler  la presse, l'opinion et toute forme d'opposition. Il réactualisait les  lois de septembre, la loi de sûreté générale, et la loi des suspects antérieures.

    « Règle générale : quand un régime promulgue sa loi des suspects, quand il dresse ses tables de proscription, quand il s'abaisse à chercher d'une main fébrile dans l'arsenal des vieilles législations les armes empoisonnées, les armes à deux tranchants de la peine forte et dure, c'est qu'il est atteint dans ses œuvres vives, c'est qu'il se débat contre un mal qui ne pardonne pas, c'est qu'il a perdu non seulement la confiance des peuples, mais toute confiance en soi-même.» ( Francis de Pressensé

    Au regard des atteintes permanentes à la liberté d'expression, le manifeste sur les lois scélérates pourrait être remis à jour  — particulièrement dans leurs mécanismes juridiques qui autorisent tous les excès d'interprétation et d'application.

    " ll s'agit de savoir à cette heure si la République Française en est là. Je m'empresse de dire bien haut que, s'il ne s'agissait que de la République telle que l'ont faite vingt-cinq ans d'opportunisme, telle que nous la connaissons sous les espèces d'un Président-parvenu qui joue au souverain, d'un premier ministre sournoisement brutal qui essaye d'adapter à sa lourde main la poignée du glaive de la raison d'État, d'un Parlement où tout est représenté, sauf la conscience et l'âme de la France, il ne vaudrait sans doute pas beaucoup la peine de se préoccuper bien vivement du sort de cet édifice branlant. ( Francis de Pressensé)

     *

    Le manifeste  sur  les « lois scélérates ». 

    Rédigé par Francis de Pressensé, un juriste (Léon Blum), et Emile Pouget, le manifeste parut en brochure en 1899. Il réunissait les textes publiés antérieurement par ces trois auteurs dans la Revue blanche, accompagnés du texte des trois lois incriminées.

  • Ah bon ! Quelle liberté de la presse ?

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    Ah bon ! Quelle liberté de la presse ?

    par  Jacques-Marie BOURGET

    La suite de l’attentat contre Charlie Hebdo est comme une deuxième mort. Quand, face aux caméras de télévision, on ne trouve rien de mieux que Caroline Fourest et Philippe Val pour défendre la liberté de la presse, c’est qu’elle-même a décampé.

    L’attentat de Richard Lenoir n’en est pas seulement un contre un hebdomadaire et ses héros, il en cache un autre, celui qui fait crier des dizaines de milliers de français venus dans la rue pour défendre la « liberté de la presse ». Quelle liberté ? Celle de Dassault, de Lagardère, de Bergé, Pigasse et Niel, celle de Drahi ou Rothschild, de Pinault ou d’Arnaud ? Les hommes au bon cœur, en sortant de chez eux pour manifester la haine qu’ils éprouvent pour les ennemies de la liberté, n’ont pas imaginé qu’en allant ainsi user leurs semelles sur le froid macadam, ils cautionnaient le système. Celui qui fait que la presse est moribonde, étouffée par ses mensonges, par ses oublis, par ses réseaux et de son peu de goût pour cette maxime venu des États Unis, mais qui me plait quand même : le journaliste est là pour réconforter les faibles et affliger les puissants.

    Le pompon, comme le cordon du poêle que l’on doit tenir en ce jour de deuil, c’est le débarquement de Sarkozy à l’Élysée. Sarko is back, la belle image. Sorti du bavardage inutile avec Hollande, de son moment de connivence entre professionnel de la politique, on a pu entendre le nouveau président de l’UMP dauber sur « le système de sécurité français qui n’est pas adapté ». Il faut oser.

    Qui a organisé l’islam de France autour de l’UOIF au point que ce chef d’œuvre vient d’être couché par les Émirats Arabes Unis sur la liste des organisations terroristes ? Qui a soufflé sur le feu en Syrie avant de semer le chaos en Libye pour en faire deux nouvelles patries du djihad ? Principalement Sarkozy et ses compères du Qatar.

    Après la tuerie de Charlie le temps est venu, non point d’ouvrir les prisons et de donner plus des fusils aux gendarmes. Le temps est venu d’un mea culpa. Il faut qu’un tribunal international juge tous les politiciens, essentiellement ceux de Washington, de Ryad et de Doha, qui ont inventé et nourri le djihad et son esprit, celui qui nous frappe aujourd’hui.
    Rappelons nous combien Ben Laden était un gentil garçon quand, aux côtés de la CIA, il se battant en Afghanistan contre les soviétiques.
    Rappelons-nous l’indifférence occidentale aux tueries perpétrées en Algérie par les sbires du GIA, dès qu’ils sont rentrés au pays leur campagne afghane terminée.
    Rappelons-nous que les États-Unis refusent toujours de publier 28 pages du rapport officiel sur les attentats du 11 septembre. Feuillets qui mettent en cause la complaisance de l’Arabie Saoudite pour les guérilleros ailés de Manhattan.

    Peine perdue, demain nous passerons le micro à des Zemmour ou des Houellebecq puisqu’il semble que ce soit avec ces remèdes que les médias, et ceux qui les possèdent, entendent faire rendre gorge aux mahométans tout en sauvegardant la liberté de la presse.

    Jacques-Marie Bourget

    URL de cet article 27748
    http://www.legrandsoir.info/ah-bon-quelle-liberte-de-la-presse.html
  • UJFP: Être ou ne pas être Charlie...

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    "L’Union Nationale" et "l’Union Sacrée" que l’émotion autour du massacre qui vient d’être commis essaie de nous imposer, manipulent les sentiments d’horreur et de révolte légitimes au service d’autres significations bien plus complexes et douteuses. La liberté d’expression n’est pas menacée en France, même la plus raciste. Nous ne sommes pas dans le camp de ceux qui soutiennent le racisme d’État ou les interventions impérialistes. Nous n’acceptons pas le "choc des civilisations" et la logique "terrorisme/antiterrorisme". Nous refusons d’avance toutes les nouvelles lois "sécuritaires" et toutes les nouvelles formes de discrimination ou d’injonction à l’égard des musulmans que cette union nationale ne peut manquer de produire. .UJFP

    Être ou ne pas être Charlie – là n’est pas la question

    UJFP - Union Juive Française pour la Paix : http://www.ujfp.org/spip.php?article3760

    vendredi 9 janvier 2015

    3992716853.pngDans le chaos provoqué par l’attentat monstrueux qui a coûté la vie à douze êtres humains, il n’est pas facile de se situer. Entre ceux qui expriment uniquement douleur et colère justifiées, ceux qui « craignent les amalgames » et ceux qui appellent à l’union nationale (et internationale) contre l’Islamisme radical sous la bannière du slogan « je suis Charlie ».

    Bien sûr, le crime appelle douleur et colère, mais contre quoi exactement ?

    Ce massacre ignoble est revendiqué par des individus qui se disent membres de Al Qaida. La nécessité absolue de combattre les mouvances obscurantistes de l’islamisme radical ne doit pas nous rendre amnésique. Ces courants qui s’imposent par la terreur affirment commettre leurs crimes au nom de l’Islam. Leur développement a été rendu possible par les interventions impérialistes, le démembrement des États et l’utilisation par l’Occident de ce courant contre les forces progressistes. En France, la situation sociale insupportable que vit la population issue de l’immigration post-coloniale, le racisme d’État, l’islamophobie, les discriminations, la stigmatisation ou les contrôles au faciès portent une responsabilité évidente dans l’essor de ce courant qui touche en réalité une frange marginale d’une jeunesse de toutes origines mais sans horizon.

    Bien sûr le crime risque de provoquer des amalgames. Mais ces amalgames sont-ils nouveaux ? Charlie Hebdo, qui a longtemps représenté pour nous l’impertinence, l’insolence de mai soixante-huit, Wolinski, Cabu, l’écologie, RESF, ne s’est-t-il pas justement distingué dans l’art graphique et politique de l’amalgame depuis des années ? Et que les choses soient claires, personne ici ne dit qu’il n’avait pas la liberté de le faire et il a eu toute liberté de le faire des années durant.

    Avoir la moindre complaisance ou compréhension pour des assassins de dessinateurs ou pour la mise à mort de gens en raison de leurs idées est insensé.

    Mais Charlie Hebdo a mené une bataille politique. Et occulter et faire oublier dans quel contexte il publiait ses caricatures faisait partie de sa bataille politique.

    Peut-on imaginer des caricatures émanant de journaux progressistes critiquant la religion juive pendant les années trente au moment de la montée de l’antisémitisme et de la persécution des juifs ? Et nous ne parlons pas ici de caricatures antisémites de l’époque mais de caricatures critiquant la religion juive.

    Comment la critique des religions pourrait-elle faire abstraction du rapport dominant/dominé ? Critiquer les religions cela se fait aussi dans un contexte, dans un moment politique qui n’est aucunement neutre à l’égard des musulmans. Les actes de Charlie Hebdo, et les caricatures et les articles sont des actes et ont participé au développement de l’islamophobie en France. Développement du mépris et du racisme à l’encontre de tous les musulmans, des lois chargées de protéger « la laïcité à la française » contre eux, des mosquées attaquées, des agressions physiques contre des gens "d’apparence musulmane". Leur désignation comme boucs émissaires de la crise économique et sociale, qu’ils subissent aussi et souvent en première ligne, à l’aide des « amalgames » est en marche depuis des années.

    Des ghettos et des discriminations, il n’en est pas question aujourd’hui, l’« union nationale » peut se faire avec le sang de tous ces morts, contre les musulmans, des mosquées brûlent déjà (encore), le terrain a été préparé de longue date.

    Le "suicide français" est en marche annonçait le mois dernier un autre Charlot.

    "L’Union Nationale" et "l’Union Sacrée" que l’émotion autour du massacre qui vient d’être commis essaie de nous imposer, manipulent les sentiments d’horreur et de révolte légitimes au service d’autres significations bien plus complexes et douteuses. La liberté d’expression n’est pas menacée en France, même la plus raciste. Nous ne sommes pas dans le camp de ceux qui soutiennent le racisme d’État ou les interventions impérialistes. Nous n’acceptons pas le "choc des civilisations" et la logique "terrorisme/antiterrorisme". Nous refusons d’avance toutes les nouvelles lois "sécuritaires" et toutes les nouvelles formes de discrimination ou d’injonction à l’égard des musulmans que cette union nationale ne peut manquer de produire. .

    Alors aujourd’hui craindre l’amalgame nous semble plus qu’insuffisant. La France se dit un État de droit, les criminels doivent être arrêtés et jugés pour leurs crimes. Mais leur crime va bien au-delà, il vient en réalité de libérer la politique de l’amalgame, et du bouc émissaire. En ce sens les bourreaux comme les victimes de l’attentat étaient partie prenante de la guerre des civilisations. En ce sens, si les assassins nous font horreur, Charlie n’était pas et n’est pas pour autant notre ami et « nous ne sommes pas Charlie ». Si notre solidarité et notre profonde compassion vont à tous les journalistes, salariés, policiers, victimes innocentes de cette tragédie et à leurs familles, l’union qu’il faut construire aujourd’hui est celle d’une France qui accepte d’être enfin celle de tous ses citoyens, musulmans inclus. La bataille contre le terrorisme passera par la bataille pour l’égalité, la justice, la reconnaissance de la France d’aujourd’hui dans toute sa diversité source d’immense richesse. Pour qu’au bout de cette nuit, le jour se lève, nous devons être aujourd’hui des musulmans.

    Bureau national de l’UJFP 9 janvier 2015

    Nous apprenons à l’instant la prise d’otage d’un supermarché casher de la Porte de Vincennes, à Paris, qui semble liée à une attaque de plus grande envergure. Plus que jamais notre travail à l’UJFP sera de construire du « commun » autour des valeurs universelles que nous venons d’énoncer. Comme juifs, nous serons toujours du côté du dominé, du racisé, du discriminé, qu’il soit musulman, Rrom, juif...

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