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Rencontre avec Elie Domota, leader du collectif "LKP" (Lyannaj Kont Pwofitasyon) à l’origine du mouvement de grève, avec Jean-Marie Nomertin, secrétaire général de la CGT-G, et avec Alex Lollia, victime de la répression policière.
Pointe à Pitre. Un mois après le début de la grève et malgré les annonces faites par le président de la République hier, les guadeloupéens restent mobilisés.
Dans les rues de Petit-Canal, un long cortège accompagne Jack Bino, ce syndicaliste tué mardi devenu le symbole du mouvement de grève, vers sa dernière demeure.
Pointe à Pitre. Après trois jours de détente, et alors que les négociations ont repris hier, la grève se durci à nouveau en Guadeloupe.
La Guadeloupe contre la pwofitasyon (5) Pointe à Pitre, cinquième semaine de grève générale. Les tambours continuent de battre et les slogans de fuser sur la place de la capitainerie du port autonome, où se tiennent les négociations. Pendant ce temps, un sondage BVA révèle que 78% des français soutiennent le mouvement de grève en Guadeloupe !
Aujourd’hui avec Patrice Tacita, figure emblématique de la scène culturelle guadeloupéenne et porte parole du mouvement culturel et identitaire AKIYO, qui nous explique l’art musical Gwo-ka (créé par les esclaves et fondé sur le chant et les percussions) et revient sur l’idée d’autonomie et d’identité
Aujourd’hui, retour sur le scandale du chlordécone.
Le chlordécone, c’est un pesticide très dangereux qui a contaminé les terres des Antilles : 50% en Martinique, 1/5 en Guadeloupe. Interdit depuis 1976 aux Etats-Unis, il ne le sera qu’en 1993 aux Antilles françaises...
Solange, qui fut témoin et victime de ces évènements, revient sur la mort de Jacques Nestor, militant très connu du G.O.N.G (Groupe d’Organisation Nationale de Guadeloupe) et l’une des premières victimes de la répression de l’Etat français.
Après 44 jours de grève générale, c’est un conflit sans précédent qui prend fin en Guadeloupe, même si les négociations et la mobilisation continuent. "C’est une étape" affirme Elie Domota, porte-parole charismatique du LKP, "mais le combat continue". Du code noir au code barre, c’est une longue lutte pour la dignité que mènent les guadeloupéens, et pour une restructuration radicale d’un système qui fait d’eux "des tubes digestifs".
" Lorsque les nègres auront faim, ils reprendront le travail !"
"Ce fut le carnage et, durant trois jours, des dizaines de blessés furent transportés dans les cliniques et les hôpitaux de la ville. La préfecture annonça officiellement huit morts. Mais il y eut des disparus, on trouva des cadavres sur la ligne de chemin de fer qui conduisait la canne à l’usine Darboussier, située à la darse de Pointe-à-Pitre, près de la place de la Victoire et de la sous-préfecture. Les cannes sortant des champs y étaient acheminées par rails. Les militaires canardaient les maisons où se tenaient les veillées mortuaires et d’autres morts innocentes furent à déplorer. L’incompréhension était grande. La répression militaire visait indistinctement les gens de la population et les militants des organisations syndicales et politiques. Il suffisait d’être à Pointe-à-Pitre ce jour-là pour risquer sa vie et être blessé." LDH
"...dans les mois précédents, des incidents racistes, une élection volée par des achats massifs de voix, et, en toile de fond, la misère des bidonvilles et un coût de la vie exorbitant pour des autochtones qui ne bénéficient pas, comme les expatriés blancs, de primes de vie chère. A Paris, Jacques Foccart, le sinistre «Monsieur Afrique» du général de Gaulle, a la Guadeloupe à l’œil : il est issu d’une riche famille de planteurs, et a grandi sur l’île. Quant aux services secrets américains, hantés par la perspective d’un nouveau Cuba, ils grenouillent dans les départements français des Caraïbes où couve une agitation indépendantiste." François-Xavier GOMEZ
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Le 24 mai 1967, en Guadeloupe, en ces jours de commémoration de l’abolition de l’esclavage en France, débutait la grève des ouvriers du bâtiment qui réclamaient 2% d’augmentation et la parité en matière de droits sociaux.
L’importance de la mobilisation et l'extrême tension pousse le patronat à convoquer enfin une réunion de négociations pour le 26 mai à la Chambre de commerce de Pointe-à-Pitre. Y participeront, en présence de l’inspection du travail, la délégation syndicale de l' UCGT et la délégation patronale.
Suite à l'ajournement des négociations, en raison de l’opposition du représentant patronal de la SOGOTRA, puis de l'arrivée de renforts de CRS devant la CCI et de l'ordre donné de tirer sur la foule, la situation dégénère vite.
" Vendredi 26 mai, 20H00 : La décision est prise – par qui : Billote ? Foccard ?. – d’envoyer les "pots de fleurs" : jeeps militaires équipées d’une mitrailleuse. Cette décision se double d’un ordre clair : « Tirer sur tout ce qui bouge, qui est noir ou qui tire ses origines de cette couleur ». [2] Pointe à Pitre est en état de siège.
Le massacre va alors virer à la boucherie
Les artères de la ville sont dégagées ; plus aucun regroupement n’est admis ; badauds, passants, riverains essuient les rafales des meurtrières. Des centaines de guadeloupéens sont pris pour cible, mis en joue, blessés, mutilés, fauchés. Le jeune Camille Taret qui rentre du travail est abattu à deux pas du domicile de ses parents. Dans la nuit, la patrouille repasse alors que les parents et proches organisent la veillée : nouvelle rafale. Gildas Landre ne se relèvera pas.
00H00 : un avion militaire en provenance de Martinique vomit d’autres assassins ; une nouvelle meute de militaires parachutistes français, chargée celle-ci de "finir le travail".
02H00 du matin : Le silence se fait. Les rues sont vides, nettoyées de toute présence guadeloupéenne exception faite des quelques policiers et indics servant de guides aux chiens..." Filpac CGT
Le lendemain, le 27 mai, les lycéens de Pointe-à-Pitre descendent dans la rue pour soutenir la lutte des ouvriers. De nouveau, les forces de l’ordre font usage de leurs armes...
Le refus du patronat de prendre en compte des revendications légitimes dans une Guadeloupe miséreuse, la tentative de laisser pourrir la situation, le mépris de classe et de race, des provocations inutiles et l'usage de la force entraîneront 2 jours d'émeute qui feront 87 morts (un terrible bilan qui ne sera connu qu'en 1985, mais on parle aussi de 200 morts) et qui seront suivis d’une longue série de procès de Guadeloupéens.
Quelques jours après les massacres, le patronat cédera : ce ne seront pas les 2% d'augmentation demandés mais 25 %...
14 février 1952 : grève et repression en Guadeloupe
En février 1952 eut lieu en Guadeloupe le mouvement revendicatif le plus important depuis les grèves de 1910
Le 14 février 1952, dans la commune du Moule, les ouvriers de l'usine Gardel qui revendiquaient une augmentation de 2% de leur salaire appelèrent à la grève. Le mouvement fut réprimé dans le sang par les forces de maintien de l'ordre : sous " les mitraillages en enfilade de la gendarmerie, en pleine rue principale du bourg du Moule ", quatre Guadeloupéens furent tués ( Constance Dulac, Capitulin Justinien, François Serdot, Édouard Dernon ) et 14 autres Guadeloupéens furent blessés.
Le mouvement social avait débuté en novembre 1951, dans le. nord de la Grande-Terre, suite à l'échec des négociations portant sur la fixation du prix d'achat de la canne à sucre et les salaires.
" Là où la grève avait commencé, en novembre 1951. Les ouvriers réclamaient une augmentation du prix de la journée de travail afin que leurs salaires soient alignés sur ceux des Français. Forts de la loi du 16 mars 1946 qui assimilait les colonies à des départements, ils avaient cessé le travail. Au fil des semaines, le mouvement s'était étendu aux petits colons et aux planteurs, exigeant un meilleur prix de la canne à la tonne. " (Béatrice Gurrey)
En janvier 1952, les fonctionnaires rejoignaient le mouvement des ouvriers et des cultivateurs et réclamaient une augmentation des salaires. Une grève générale affectait alors les plantations et s'étendaient du Moule à Capesterre, Sainte-Rose et Anse Bertrand.
(...)On se souvient aussi de ce 14 février 2009 où des dizaines de milliers de manifestants s’étaient retrouvés là, prés de la petite stèle élevée il y a quelques années en mémoire des victimesde cette énième tuerie perpétrée par les troupes coloniales contre des travailleurs. Nous étions en pleine grève générale dirigée par le LKP (Liyannaj Kont Pwofitasyon- unité contre la surexploitation) et ses 48 organisations dont l’ensemble des syndicats de Guadeloupe.
La grève générale des travailleurs de la canne
Le " massacre de la Saint Valentin " comme on nomma cette tuerie survenait dans le cours d’une grande grève des travailleurs de la canne : ouvriers d’usine, et travailleurs des champs (coupeurs de canne et amarreuses). Le mouvement fut déclenché au mois de novembre 1951 dans le nord de la Grande Terre. Les revendications étaient : 125 francs de l’heure (de l’époque) estimé comme salaire minimum par la chambre de commerce. Les travailleurs ramenèrent cette revendication à 100F/h pour tous. Les petits planteurs réclamaient le paiement de la «ristourne». La ristourne était une dette que les patrons sucriers devaient aux petits paysans. Car ces patrons attendaient de connaître le prix du sucre sur le marché international pour fixer définitivement le prix de la tonne de canne en Guadeloupe. La nouvelle récolte allait démarrer sans que les petits paysans soient payés pour les cannes livrées de la récolte précédente. On comprend donc leur colère. De plus, en ce qui concerne les salaires des ouvriers, le gouvernement fixa le salaire minimum en Guadeloupe à 76F/h. Ce fut alors le déclenchement de la colère générale. En janvier 1952 les travailleurs de la canne reçurent le soutien des fonctionnaires qui réclamaient la revalorisation de leur salaire.
La grève devint générale et illimitée dans toute l’île. Un «cartel» syndical dirigeait le mouvement, formé de la CGT avec Gargar, de l’union départementale CGT (ancêtre de la CGTG) avec Nicolas Ludger, de la CFTC avec Démocrite, du syndicat autonome des enseignants, du syndicat des médecins hospitaliers.
Face aux patrouilles de CRS armés menaçants et provocateurs, les travailleurs répliquèrent, y compris par des petites bombes artisanales. Les patrons du sucre jouaient la montre et le pourrissement de la grève. Le 11 février, les CRS prirent position dans la ville du Moule qui fut occupée militairement. Le 14 février 1952 un barrage fut érigé par les travailleurs à l’entrée du boulevard Rougé (rue principale du Moule) pour empêcher l’accès de l’usine Gardel aux charrettes à cannes. C’est alors que les troupes françaises tirèrent à vue sur la foule. Quatre personnes furent tuées : Constance Dulac (enceinte), Capitolin Justinien, Edouard Dernon, François Serdot. Il y eut aussi 14 blessés.
Une tuerie préparée et organisée
Comme toujours dans l’histoire du mouvement ouvrier de Guadeloupe et de Martinique, ces tueries étaient bien préparées entre Préfet, patrons et militaires. Il fallait réprimer - au besoin dans le sang.
En février 1952, c’était d’autant plus vrai que le mouvement ouvrier était largement soutenu par le Parti Communiste Guadeloupéen (PCG à l’époque Fédération du Parti Communiste Français) qui comptait nombre de militants ouvriers, de cadres et de dirigeants syndicaux. C’était le cas par exemple de Nicolas Ludger. Et ce n’est pas un hasard si la répression sanglante eut lieu à Moule, fief du PCG et ville de son dirigeant d’alors et aussi fondateur : Rosan Girard. Ce dernier était un dirigeant et orateur charismatique. Il fut aussi maire du Moule et député, particulièrement apprécié par les travailleurs et les masses populaires. L’occasion était donc trop belle pour le pouvoir colonial qui en profita pour tenter d’intimider les travailleurs du Moule et faire reprendre le travail par la force des armes. Il fallait aussi faire porter aux militants communistes et à Rosan Girard la responsabilité des «désordres sociaux» voire même de la tuerie perpétrée par les troupes coloniales.
Une grève historique
Le vendredi 15 février 1952, le préfet Villeger, le même qui avait ordonné l’occupation de la ville du Moule, fixa le salaire de base à 88 F l’heure au lieu de 76 F. Et s’agissant des ristournes pour les cannes livrées par les planteurs en 1950 et 1951, il les fixa à 434 francs par tonne. Ce qu’il ne pouvait faire hier il put le faire le jour même de la tuerie.
La grève de 1952 compte dans l’histoire parmi les trois plus grandes grèves du mouvement ouvrier de Guadeloupe : après celle de 1910 et avant celle de février 2009 par ordre d’importance !