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pointe-à-pitre

  • Mai 1967, émeutes et massacres en Guadeloupe

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    " Lorsque les nègres auront faim, ils reprendront le travail !"

    "Ce fut le carnage et, durant trois jours, des dizaines de blessés furent transportés dans les cliniques et les hôpitaux de la ville. La préfecture annonça officiellement huit morts. Mais il y eut des disparus, on trouva des cadavres sur la ligne de chemin de fer qui conduisait la canne à l’usine Darboussier, située à la darse de Pointe-à-Pitre, près de la place de la Victoire et de la sous-préfecture. Les cannes sortant des champs y étaient acheminées par rails. Les militaires canardaient les maisons où se tenaient les veillées mortuaires et d’autres morts innocentes furent à déplorer. L’incompréhension était grande. La répression militaire visait indistinctement les gens de la population et les militants des organisations syndicales et politiques. Il suffisait d’être à Pointe-à-Pitre ce jour-là pour risquer sa vie et être blessé." LDH

    "...dans les mois précédents, des incidents racistes, une élection volée par des achats massifs de voix, et, en toile de fond, la misère des bidonvilles et un coût de la vie exorbitant pour des autochtones qui ne bénéficient pas, comme les expatriés blancs, de primes de vie chère. A Paris, Jacques Foccart, le sinistre «Monsieur Afrique» du général de Gaulle, a la Guadeloupe à l’œil : il est issu d’une riche famille de planteurs, et a grandi sur l’île. Quant aux services secrets américains, hantés par la perspective d’un nouveau Cuba, ils grenouillent dans les départements français des Caraïbes où couve une agitation indépendantiste." François-Xavier GOMEZ

    *

    Le 24 mai 1967, en Guadeloupe, en ces jours de commémoration de l’abolition de l’esclavage en France, débutait la grève des ouvriers du bâtiment qui réclamaient 2% d’augmentation et la parité en matière de droits sociaux.

    L’importance de la mobilisation et l'extrême tension pousse le patronat à convoquer  enfin une réunion de négociations pour le 26 mai à la Chambre de commerce de Pointe-à-Pitre. Y participeront, en présence de l’inspection du travail, la délégation syndicale de l' UCGT et la délégation patronale.

    Suite à l'ajournement des négociations, en raison de l’opposition du représentant patronal de la SOGOTRA, puis de l'arrivée de renforts de CRS devant la CCI et de l'ordre donné de tirer sur la foule, la situation dégénère vite.

    " Vendredi 26 mai, 20H00 : La décision est prise – par qui : Billote ? Foccard ?. – d’envoyer les "pots de fleurs" : jeeps militaires équipées d’une mitrailleuse. Cette décision se double d’un ordre clair : « Tirer sur tout ce qui bouge, qui est noir ou qui tire ses origines de cette couleur ». [2] Pointe à Pitre est en état de siège.

    Le massacre va alors virer à la boucherie

    Les artères de la ville sont dégagées ; plus aucun regroupement n’est admis ; badauds, passants, riverains essuient les rafales des meurtrières. Des centaines de guadeloupéens sont pris pour cible, mis en joue, blessés, mutilés, fauchés. Le jeune Camille Taret qui rentre du travail est abattu à deux pas du domicile de ses parents. Dans la nuit, la patrouille repasse alors que les parents et proches organisent la veillée : nouvelle rafale. Gildas Landre ne se relèvera pas.

    00H00 : un avion militaire en provenance de Martinique vomit d’autres assassins ; une nouvelle meute de militaires parachutistes français, chargée celle-ci de "finir le travail".

    02H00 du matin : Le silence se fait. Les rues sont vides, nettoyées de toute présence guadeloupéenne exception faite des quelques policiers et indics servant de guides aux chiens..." Filpac CGT

    Le lendemain, le 27 mai, les lycéens de Pointe-à-Pitre descendent dans la rue pour soutenir la lutte des ouvriers. De nouveau, les forces de l’ordre font usage de leurs armes...

    Le refus du patronat de prendre en compte des revendications légitimes dans une Guadeloupe miséreuse, la tentative de laisser pourrir la situation, le mépris de classe et de race, des provocations inutiles  et l'usage de la force entraîneront 2 jours d'émeute qui feront 87 morts (un  terrible bilan qui ne sera connu qu'en 1985, mais on parle aussi de 200 morts) et  qui seront suivis  d’une longue série de procès de Guadeloupéens.

    Quelques jours après les massacres, le patronat cédera : ce ne seront pas les 2% d'augmentation demandés mais 25 %...

    mai1967_photo001_300.jpg

     Quadrillage militaire de Pointe-à Pitre ;
    quartier Dubouchage, quelques jours après les événements, fin mai 1967.
    Coll. J.P. Sainton.

    > "La grève des ouvriers du bâtiment" sur le site de l'UGTG

    >  " 26 mai 1967 : à propos d’un massacre « oublié » en Guadeloupe" -  Fédération des travailleurs des Industries du Livre, du Papier et de la Communication Cgt

    > " La Guadeloupe n'a pas oublié"  Par Jean-Moïse Braitberg sur le site Backchich

    > Mé 67 en Guadeloupe: une répression coloniale de plus? Entretien avec Jean-Pierre Sainton. Site Dormira jamais

    > Quarante ans de silence et toujours pas de bilan authentifié,  par Béatrice Gurrey - Le Monde

    > Guadeloupe, mai 1967 : un drame français. Ligue des droits de l'homme

    > «Mé 67», la mémoire d'un massacre en Guadeloupe  - 2015 Libération.