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  • Le mur des Fédérés morts pour la république

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    Le samedi 27 mai 1871, à la fin de la " semaine sanglante " qui marque la fin de la Commune de Paris, les troupes versaillaises parviennent à investir le cimetière du Père-Lachaise où des fédérés se sont repliés. Après une résistance de plusieurs heures dans ce camp retranché, cent quarante-sept communards sont arrêtés puis fusillés contre le mur est de l’enceinte du cimetière. C'est en leur souvenir qu'une section de la muraille est appelée le "Mur des Fédérés".

    Le mur des fédérés, Ernest Pichio

    Dans les années suivantes, d'anciens communards, leurs proches et leurs amis, commémorent le massacre en fleurissant ce terrain à l’accès interdit ou étroitement surveillé par la police. 

    Dès 1880, c'est au tour de militants politiques de gauche, de syndicalistes et de francs maçons de cultiver tous les ans, par une " montée au Mur ", cet héritage disputé, parfois très violemment, entre les différentes tendances du mouvement ouvrier.  

    Front populaire

    24 mai 1936 :manifestation du Front populaire au mur des Fédérés :   Sur le site Gallica BnF, d'autres photographies de l' Agence Meurisse 

    Discours de Léon Blum

    Le Populaire, dimanche 24 mai 1936

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    VIVE la Commune ! Vive le Gouvernement de Front Populaire !... Ces deux cris ne sont pas rapprochés Arbitrairement l'un de l'autre pour les besoins de l'actualité. Ils traduisent la même vérité. Ils expriment le même espoir. Pour reprendre la formule inscrite hier dans  la manchette du « Populaire » la commémoration des morts de la Commune dira l'espoir vivant des hommes d'aujourd'hui. Ils sont morts pour la Liberté. ils sont morts pour la Justice sociale. Ils sont morts pour la Répuhlique. Ils sont morts pour tout et que le Front Populaire incarne. Les combattants héroïques des bar ricades - à Paris et dans les villes de province, levées à l'appel de  Paris  - ont payé de leur sang la salut de la démocratie.

    Une répression féroce les a décimés. Ceux qui avaient échappé aux fusillades méthodiques de Satory, sont partis pour le bagne ou pour l'exil.

    On les croyait vaincus, extirpés à jamais . Mais ces vaincus étaient cependant des vainqueurs. sans la Commune révolutionnaire la réaction monarchique et cléricale se fut installée souverainement en France. Thiers avait écrasé la Commune, et c'est la Commune qui imposa la République à Thiers. C'est le souvenir légendaire de la Commune, c'est la leçon de ses forçats et de ses proscrits qui préserva et qui prolongea la grande tradition de la démocratie sociale.

    Jamais, en France, on n'a pu séparer impunément ces deux forces vivantes l'idée républicaine, la passion révolutionnaire du peuple. Le Rassemblement Populaire contre la menace fasciste, la victoire électorale du 26 avril et du 3 mai sont dus à la combinaison de ces deux forces.

    Nous avons donc le droit d'invoquer aujourd'hui  en leur disant : : « Notre victoire est la vôtre.. Vive la Commune ! Vive le  Front Populaire ! »

     

    >  Le Mur des Fédérés -  L'Histoire par l'image

    >  Les montées au Mur - Les maies et amis de la Commune de Paris - 1871

    > Le Populaire, 24 mai 1936 : " Vive la Commune! Vive le Front populaire!"

    > L'Humanité, 25 mai 1936 : " 600 000 au Mur"

  • "L’impuissance du réformisme légal en temps de crise"

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     Les racines de la social-démocratie

     

    " On peut tout trouver dans les rangs de la social-démocratie, sauf des esprits véritablement libres."

    Simone Weil (1909-1943)

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    Dans Le Libertaire du 24 juin 1937, Jean Bernier (1894-1975) dressait le portrait d'une social-démocratie  " tenue en laisse  par le grand capital " et d'un front populaire en faillite en raison de " la faiblesse incurable, l’impuissance du réformisme légal en temps de crise et de déclin capitalistes, quand la contraction du profit tend les antagonismes et pose entre les classes et le pays la question de force."

    En mai 1936,  la coalition du Front populaire avait obtenu aux élections  la majorité absolue face à la droite. Un an plus tard, le 21 juin 1937, Le Sénat refusait de lui accorder les pleins pouvoirs pour redresser une situation financière difficile. face à la réaction "légale", le gouvernement de Léon Blum démissionnait piteusement.

    En ces jours d'entrées diverses au Panthéon, dont celle de Jean Zay, ministre du front populaire assassiné par les miliciens en juin 1944 et dont la mémoire est toujours salis par les néo-fascistes, une rectification sur l'expérience de Léon Blum tellement encensée par la social-démocratie et qui, par ses faiblesses et capitulations, ouvrit grand les portes à la réaction la plus noire et capitula en rase campagne.

    "L’histoire porte à son crédit la signature des accords Matignon (congés payés, conventions collectives et semaine de 40 heures).  Il ne faut toutefois pas oublier qu’ils furent surtout obtenus grâce au mouvement des grèves avec occupation qui débuta le 26 mai dans les usines métallurgiques de la région parisienne et prit une ampleur nationale, échappant au contrôle des syndicats. Alors que les occupations d’usine se poursuivaient, Maurice Thorez, secrétaire général du PCF, déclarait, le 12 juin : « Il faut savoir terminer une grève. » On rappelle également beaucoup moins souvent que la Chambre élue en 1936 vota, avec le Sénat, en faveur du maréchal Pétain en 1940, par 569 voix contre 80." (Revue Agone)

     

    "La fin misérable de l’expérience Blum"

    Jean Bernier

    3992716853.png LE GRAND MINISTERE DU FRONT POPULAIRE à direction socialiste est mort comme il a vécu, comme il a de plus en plus vécu : misérablement.

    Depuis l’instauration de la « pause », depuis l’emprunt de la défense nationale, souscrit comme une aumône, et à titre d’avertissement, par ces trusts et ces banques qu’il avait juré d’abattre, le gouvernement de Front populaire vivait, ou plutôt se survivait, à la petite semaine.

    Le gouffre du déficit se creusait devant lui.

    Le Trésor criait famine. Le fonds d’égalisation des changes se vidait. Tenu en laisse par le grand capital, diminué, dérisoire, Blum se débattait dans les liens, qu’il avait lui-même noués, de la légalité bourgeoise. Pris à la gorge par l’impératif financier, il n’opposait à cette forme catégorique et toute naturelle de la coercition capitaliste que les bulletins de vote et les écharpes de députés conquis aux dernières élections législatives. Le capital en grève, le patronat revenu de sa grande peur de l’an dernier, se souciait peu de ces bruyantes mais platoniques incantations. Et les tentatives de compromis à coups d’impôts indirects sur le dos des pauvres, comme les petites habiletés parlementaires, les manœuvres byzantines et les acrobaties verbales auxquelles se livrait en virtuose ce juriste et ce bourgeois libéral, plein de ces bonnes intentions sociales dont est pavé l’enfer, n’amenaient pas dans les caisses de M. Vincent Auriol le moindre maravédis.

    Comme un quelconque ministère de cartel, comme un vulgaire Herriot, il fallait se soumettre, à fond cette fois et sans recours, ou se démettre en sauvant la face. Très constitutionnellement, très légalement, le Sénat porta l’estocade. Et cet homme harassé, qui avouait trouver « séduisante » l’idée d’un « départ volontaire », s’effondra.

    Ce qui tombe avec lui, au pied de ce mur d’argent, cimenté de tant de sang, de sueur et de larmes, ce qui tombe une fois de plus, pour renaître, jusqu’à quand ?

    C’est l’illusion parlementaire où se gâche et s’englue la force des travailleurs, c’est la faiblesse incurable, l’impuissance du réformisme légal en temps de crise et de déclin capitalistes, quand la contraction du profit tend les antagonismes et pose entre les classes et le pays la question de force. Ce que Blum paie d’une chute misérable que les chefs « socialistes », « communistes » et cégétistes ont de la peine à faire admettre à bien des militants du rang déconcertés ou révoltés par tant de lâche docilité, c’est, par une fatalité qui lui est inhérente, à lui comme à tous les politiciens libéraux, d’avoir méconnu, rayé de ses calculs et de ses moyens d’action, la force ouvrière, inconsciente mais vive, qui l’avait porté au pouvoir.

    Qu’on se rappelle juin 1936, les occupations d’usines, la vague de grèves qui dressait soudain des millions d’esclaves, enivrés de se retrouver des hommes, la panique de la grande bourgeoisie, la sympathie, voire l’enthousiasme des classes dites moyennes !

    Quelles possibilités ne s’offraient-elles pas à un gouvernement à direction vraiment socialiste, décidé à s’appuyer sur une pareille décharge d’énergie !

    À l’intérieur, une dévaluation franche, faite à froid, dans les meilleures conditions techniques. Les premières socialisations, celle, par exemple, du trust des assurances, à laquelle la grande bourgeoisie elle-même s’attendait…

    À l’extérieur, la répudiation solennelle du traité de Versailles, l’édification d’une Europe économiquement et psychologiquement viable pour des années, un désarmement substantiel et l’énorme allégement budgétaire qui en eût résulté, l’extirpation de la puissante racine du fascisme… Que d’occasions perdues, que de journées de dupes !

    Que de cortèges, de manifestations, de fêtes, de chants, de mises en scène et de serments ! Que de discours, de manifestes, d’interviews, de déclarations et de meetings pour finalement passer la main à quelque maquignon chevronné du Parlement et recommencer avec lui l’éternel petit jeu « républicain » des ministres de « gauche » à politique de « droite », des dosages, des combines et des couleuvres à faire avaler au bon peuple !

    Certes, Blum n’a pas – comme l’eût fait l’Union nationale – lancé la garde mobile contre les grévistes en juin 1936. Certes, Blum n’a pas – comme le voulaient les « communistes » –, comme l’eûrent fait peut-être Barthou ou Herriot, joué à fond le jeu funeste de Staline dans la mêlée impérialiste. Bien sûr, il a offert, momentanément, à la classe ouvrière une ligne de moindre résistance en occupant l’État bourgeois, et il n’a pas anéanti les dernières chances de paix. Mais, avec plus d’évidence encore, ne peut-on faire valoir que les mérites, passifs sinon négatifs et qui laissent planer sur nous les pires menaces de réaction et de guerre, ont bien fait les affaires du capitalisme français ?

    Blum n’a-t-il pas permis à celui-ci de contenir, puis de consolider l’offensive de ses exploités dans l’impasse du syndicalisme d’État, pour passer finalement à la contre-attaque de la vie chère et des « aménagements », en attendant la répression dans les usines et dans la rue ?

    À grand renfort de drapeaux tricolores et de Marseillaise, avec la complicité de Staline et de Jouhaux, n’a-t-il pas enfin, plus fortement que jamais, attaché les organisations ouvrières françaises au char de l’impérialisme, et n’a-t-il pas, mieux que n’importe quel nationaliste professionnel, travaillé ainsi à la formation d’une prochaine Union sacrée ?

    Non ! La chute de l’ex-chef du gouvernement de Front populaire à direction socialiste, qui consommera sans doute demain sa déchéance, en qualité de sous-chef du gouvernement de Front populaire à direction radicale, ne doit pas être déplorée par les ouvriers révolutionnaires.

    L’homme qui, la veille de sa chute, dans un ultime effort pour garder le pouvoir, se vantait devant de Sénat « d’appliquer tout son effort à modérer le sentiment du pays » n’est pas des nôtres.

    Son échec n’est qu’un échec de plus, à porter au compte de ce socialisme parlementaire, réformiste et impérialiste qui tua la révolution en Europe, de 1914 à 1920.

    Le Libertaire, 24 juin 1937

    Source : Jean Bernier, « La fin misérable de l’expérience Blum », revue Agone, 28 | 2003. URL : http://revueagone.revues.org/457.