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"Qu'on nous apporte ces titres qui humilient l'espèce humaine..."

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"Qu'on nous apporte ces titres qui humilient l'espèce humaine..."

Le 4 août 1789, sous la pression populaire, l'Assemblée Constituante issue de la Révolution votait l'abolition des privilèges féodaux et mettait ainsi fin à la structure économique de l'Ancien Régime.

C'est la nuit... allumons nos lanternes...

3992716853.png Tout semblait fini. Une scène non moins grande commençait. Après les privilèges des classes, vinrent ceux des provinces. Celles qu’on appelait Pays d’État, qui avaient des privilèges à elles, des avantages divers pour les libertés, pour l’impôt, rougirent de leur égoïsme, elles voulurent être France, quoi qu’il pût en coûter à leur intérêt personnel, à leurs vieux et bons souvenirs. Le Dauphiné, dès 1788 (cf Vizille après la journée des Tuiles), l’avait offert magnanimement pour lui-même et conseillé aux autres provinces. Il renouvela cette offre. Les plus obstinés, les Bretons, quoique liés par leurs mandats, liés par les anciens traités de leur province avec la France, n’en manifestèrent pas moins le désir de se réunir. La Provence en dit autant, puis la Bourgogne et la Bresse, la Normandie, le Poitou, l’Auvergne, l’Artois. La Lorraine, en termes touchants, dit qu’elle ne regretterait pas la domination de ses souverains adorés qui furent pères du peuple, si elle avait le bonheur de se réunir à ses frères, d’entrer avec eux dans cette maison maternelle de la France, dans cette immense et glorieuse famille ! Puis ce fut le tour des villes. »

Michelet
Histoire de Révolution française,

Nuit du 4 août 1789

3992716853.pngM. Le Guen de Kerengal, député de la Basse Bretagne :

" Messieurs, une grande question nous a agités aujourd'hui; la déclaration des droits de l'homme et du citoyen a été jugée nécessaire. L'abus que le peuple fait de ces mêmes droits vous presse de les expliquer, et de poser d'une main habile les bornes qu'il ne doit pas franchir; il se tiendra sûrement en arrière.

Vous eussiez prévenu l'incendie des châteaux, si vous aviez été plus prompts à déclarer que les armes terribles qu'ils contenaient, et qui tourmentent le peuple depuis des siècles, allaient être anéanties par le rachat forcé que vous en alliez ordonner.

Le peuple, impatient d'obtenir justice et las de l'oppression, s'empresse à détruire ces titres, monuments de la barbarie de nos pères.

Soyons justes, messieurs : qu'on nous apporte ici les titres qui outragent, non-seulement la pudeur, mais l'humanité même. Qu'on nous apporte ces titres qui humilient l'espèce humaine, en exigeant que les hommes soient attelés à une charrette comme les animaux du labourage. Qu'on nous apporte ces titres qui obligent les hommes à passer les nuits à battre les étangs pour empêcher les grenouilles de troubler le sommeil de leurs voluptueux seigneurs.

Qui de nous, messieurs, dans ce siècle de lumières, ne ferait pas un bûcher expiatoire de ces infâmes parchemins, et ne porterait pas le flambeau pour en faire un sacrifice sur l'autel du bien public?

Vous ne ramènerez, messieurs, le calme dans la France agitée, que quand vous aurez promis au peuple que vous allez convertir en prestations en argent, rachetables à volonté, tous les droits féodaux quelconques ; que les lois que vous allez promulguer anéantiront jusqu'aux moindres traces dont il se plaint justement. Dites-lui que vous reconnaissez l'injustice de ces droits acquis dans des temps d'ignorance et de ténèbres.

Pour le bien de la paix, hâtez-vous de donner ces promesses à la France; un cri général se fait entendre; vous n'avez pas un moment à perdre ; un jour de délai occasionne de nouveaux embrasements; la chute des empires est annoncée avec moins de fracas. Ne voulez-vous donner des lois qu'à la France dévastée ? "

La question des franchises provinciales

Le parlement de Rennes déclara cette renonciation sans valeur. Il ne reconnaissait qu'aux États provinciaux le droit de l'accepter ou non. Les magistrats mandés devant la Constituante maintinrent leur protestation. L' Assemblée, sous l'inspiration de Mirabeau, rendra un décret les blâmant et les suspendant de leur fonction. C'était la fin du parlement ainsi que du régime établi depuis François Ier.

Le Chapelier :

" Les Bretons ont renouvelé leur union à la France, en nous envoyant vers vous. Ils ont adhéré à ce que vous avez  fait, et par leurs adresses, et en montrant leur  allégresse, et en déployant leurs forces pour soutenir vos opérations.... Ces magistrats veulent composer nos chaînes de ces privilèges  mêmes dont ils regrettent la perte. Ils ont établi, ils ont soutenu la violence de ceux qui se disent les défenseurs de ces privilèges et  qui en étaient les propriétaires exclusifs.

Qui oserait conseiller à une province de s'isoler de la France, de préférer à la liberté, des chartes qui ne font que placer le peuple sous le joug de quelques privilégiés ? Les nobles et les ecclésiastiques , dit-on, n'ont pas consenti... Où est donc la nation bretonne? Dans quinze cents gentilshommes et quelques ecclésiastiques, ou dans deux millions d'hommes ? Si les  magistrats n'avaient pas voulu que la robe sénatoriale ne couvrît qu'un noble , feraient-ils d'aussi aveugles réclamations? Ce sont des magistrats nobles, qui défendent des nobles pour opprimer le peuple. Voilà ce qu'ils appellent nos franchises et leurs devoirs."

> Histoire de la révolution dans les départements de l'ancienne Bretagne, Volume 1 - Par Armand Du Chatellier

 

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